Citations

Quelques citations intéressantes de personnes intéressantes dont certaines prises sur le site de JC Bellamy.

Voltaire :

La morale :
La morale n’est point dans la superstition, elle n’est point dans les cérémonies, elle n’a rien de commun avec les dogmes. On ne peut trop répéter que tous les dogmes sont différents, et que la morale est la même chez tous les hommes qui font usage de leur raison. La morale vient donc de Dieu comme la lumière. Nos superstitions ne sont que ténèbres. Lecteur, réfléchissez: étendez cette vérité; tirez vos conséquences.

La tolérance :
Qu’est-ce que la tolérance? c’est l’apanage de l’humanité. Nous sommes tous pétris de faiblesses et d’erreurs; pardonnons-nous réciproquement nos sottises, c’est la première loi de la nature.
    Qu’à la bourse d’Amsterdam, de Londres, ou de Surate, ou de Bassora, le guèbre, le banian, le juif, le mahométan, le déicole chinois, le bramin, le chrétien grec, le chrétien romain, le chrétien protestant, le chrétien quaker, trafiquent ensemble, ils ne lèveront pas le poignard les uns sur les autres pour gagner des âmes à leur religion. Pourquoi donc nous sommes-nous égorgés presque sans interruption depuis le premier concile de Nicée?
    [...]
    Il est clair que tout particulier qui persécute un homme, son frère, parce qu’il n’est pas de son opinion, est un monstre; cela ne souffre pas de difficulté: mais le gouvernement, mais les magistrats, mais les princes, comment en useront-ils envers ceux qui ont un autre culte que le leur? Si ce sont des étrangers puissants, il est certain qu’un prince fera alliance avec eux. François Ier très chrétien s’unira avec les musulmans contre Charles-Quint très catholique. François Ier donnera de l’argent aux luthériens d’Allemagne pour les soutenir dans leur révolte contre l’empereur; mais il commencera, selon l’usage, par faire brûler les luthériens chez lui. Il les paye en Saxe par politique; il les brûle par politique à Paris. Mais qu’arrivera-t-il? Les persécutions font des prosélytes; bientôt la France sera pleine de nouveaux protestants: d’abord ils se laisseront pendre, et puis ils pendront à leur tour. Il y aura des guerres civiles, puis viendra la Saint-Barthélemy; et ce coin du monde sera pire que tout ce que les anciens et les modernes ont jamais dit de l’enfer.
    [...]
    Cette horrible discorde, qui dure depuis tant de siècles, est une leçon bien frappante que nous devons mutuellement nous pardonner nos erreurs; la discorde est le grand mal du genre humain, et la tolérance en est le seul remède.
    Il n’y a personne qui ne convienne de cette vérité, soit qu’il médite de sang-froid dans son cabinet, soit qu’il examine paisiblement la vérité avec ses amis. Pourquoi donc les mêmes hommes qui admettent en particulier l’indulgence, la bienfaisance, la justice, s’élèvent-ils en public avec tant de fureur contre ces vertus? Pourquoi? c’est que leur intérêt est leur dieu, c’est qu’ils sacrifient tout à ce monstre qu’ils adorent.

Fanatisme :
    Comptons maintenant les milliers d’esclaves que le fanatisme a faits, soit en Asie, où l’incirconcision était une tache d’infamie; soit en Afrique, où le nom de chrétien était un crime; soit en Amérique, ou le prétexte du baptême étouffa l’humanité. Comptons les milliers d’hommes que l’on a vus périr ou sur les échafauds dans les siècles de persécution, ou dans les guerres civiles par la main de leurs concitoyens, ou de leurs propres mains par des macérations excessives. Parcourons la surface de la Terre, et après avoir vu d’un coup d’œil tant d’étendards déployés au nom de la religion, en Espagne contre les Maures, en France contre les Turcs, en Hongrie contre les Tartares; tant d’ordres militaires, fondés pour convertir les infidèles à coups d’épée, s’entr’égorger aux pieds de l’autel qu’ils devaient défendre, détournons nos regards de ce tribunal affreux élevé sur le corps des innocents et des malheureux pour juger les vivants comme Dieu jugera les morts, mais avec une balance bien différente.
    En un mot, toutes les horreurs de quinze siècles renouvelées plusieurs fois dans un seul, des peuples sans défense égorgés aux pieds des autels, des rois poignardés ou empoisonnés, un vaste État réduit à sa moitié par ses propres citoyens, la nation la plus belliqueuse et la plus pacifique divisée d’avec elle-même, le glaive tiré entre le fils et le père, des usurpateurs, des tyrans, des bourreaux, des parricides et des sacrilèges, violant toutes les conventions divines et humaines par esprit de religion: voilà l’histoire du fanatisme et ses exploits.
    [...]
    Le plus grand exemple de fanatisme est celui des bourgeois de Paris qui coururent assassiner, égorger, jeter par les fenêtres, mettre en pièces, la nuit de la Saint-Barthélemy, leurs concitoyens qui n’allaient point à la messe. Guyon, Patouillet, Chaudon, Nonotte, l’ex-jésuite Paulian, ne sont que des fanatiques du coin de la rue, des misérables à qui on ne prend pas garde: mais un jour de Saint-Barthélemy ils feraient de grandes choses.
    Il y a des fanatiques de sang-froid: ce sont les juges qui condamnent à la mort ceux qui n’ont d’autre crime que de ne pas penser comme eux; et ces juges-là sont d’autant plus coupables, d’autant plus dignes de l’exécration du genre humain, que, n’étant pas dans un accès de fureur comme les Clément, les Chastel, les Ravaillac, les Damiens, il semble qu’ils pourraient écouter la raison.


Albert Einstein :

Richesse :
Toutes les richesses du monde, fussent-elles entre les mains d’un homme totalement acquis à l’idée de progrès, ne permettront jamais le moindre développement moral de l’humanité. Seuls, des êtres humains exceptionnels et irréprochables suscitent des idées généreuses et des actions sublimes. Mais l’argent pollue toute chose et dégrade inexorablement la personne humaine.


Albert Jacquard :

Travail :
Tout a changé avec l’invention de l’élevage et de l’agriculture; il a fallu préparer les champs, stocker les récoltes, les protéger... d’où l’apparition d’activités nouvelles, le plus souvent très fatigantes, ou même chargées de dangers mortels comme les guerres. L’essentiel du temps a été consacré au "travail". Pour se justifier vis-à-vis d’eux-mêmes, les hommes ont alors imaginé de faire de ce travail une fatalité imposée par les puissances divines, une malédiction.
    Le travail n’est ni une malédiction ni même un devoir inconditionnel. Le devoir des hommes est de participer à la construction des personnes, la sienne comprise. Il faut pour cela, bien sûr, préserver la vie, donc obtenir les biens, nourriture, énergie, sécurité qui sont nécessaires à la poursuite de nos métabolismes. Si cela ne peut être obtenu sans travail, ce travail est effectivement un devoir. Mais si, par chance, ces biens sont offerts par la nature, ou réalisés en grande partie par des machines, on ne voit pas au nom de quoi on imposerait aux hommes de travailler.
    Avoir fait du travail la source de l’entrée en humanité me semble une perversion. On a confondu, plus ou moins sciemment, le travail-torture et l’activité libérante. La générosité, le dévouement sont des attitudes plus anoblissantes que le courage au travail.
    En fait, la glorification du travail a été, pour des régimes totalitaires, un bon moyen de préserver l’ordre établi; pendant qu’ils sont au travail, les citoyens n’ont pas le goût ou la possibilité de se poser, et de poser au pouvoir, les questions fondamentales. L’oisiveté est, dit-on, la mère de tous les vices, mais l’excès de travail est le père de toutes les soumissions.
    Cette négation du rôle quasi religieux du travail n’est pas une apologie de la paresse. Ne pas travailler n’est pas rester inactif; c’est profiter d’un temps disponible pour échanger, rencontrer, réfléchir, seul ou à plusieurs, lire, écouter, créer. En ce sens, un enseignant ne "travaille" jamais, non plus un enseigné. En revanche, leur activité peut beaucoup les fatiguer, ce n’est pas incompatible.
    La diminution de la quantité de travail permettant de produire les biens nécessaires devrait être saluée comme un des grands succès de notre imagination créatrice. Que cette diminution soit source de chômage est le signe d’une erreur fondamentale de l’organisation de notre société. Le véritable remède contre le chômage est qu’il n’y ait plus de travail pour personne, mais pour chacun une place dans la société.

Religion :
La laïcité est l’acceptation de toutes les opinions et de tous les comportements qui savent respecter l’autre. L’unicité de Dieu proposée par le pharaon Akhenaton est en fait la base de la laïcité. Il n’est plus question de s’entre-déchirer au nom d’une multitude de divinités, mais de constater l’unicité de l’espèce humaine dans son devenir.
    [...]
    Une société est laïque lorsqu’elle permet à tous d’adhérer aux diverses croyances, avec comme seule restriction le respect des autres. Cette laïcité est la base même de la vie en commun. À l’entrée de la Cité des Hommes, on devrait inscrire : "Que nul n’entre ici s’il n’est respectueux des autres."
    Le croyant, s’il est chrétien, regarde comme une vérité évidente l’affirmation que Jésus est le Fils de Dieu ; s’il est musulman, l’affirmation que le Coran a été dicté par Dieu à Mahomet. Ces affirmations ne peuvent évidemment pas faire l’objet d’une preuve. Personnellement, je ne vois pas pourquoi je les accepterais comme vraies ; je ne suis donc pas "croyant". Pour autant je ne peux prétendre qu’elles sont fausses ; je ne suis donc nullement "athée". Je suis, comme beaucoup, agnostique, c’est-à-dire conscient de mon incapacité à dire quoi que ce soit à propos de ce qu’il est convenu de désigner par le mot Dieu.
    Cette foi que je ne partage pas, je la respecte infiniment chez ceux qui la proclament, car elle est présente au plus intime de leur personne. Ce n’est pas à moi à semer le doute en eux. J’ai, en revanche, à confronter les conséquences qu’ils tirent de leur foi pour leur comportement avec celles que je tire de mes propres convictions. Or, bien souvent, il y a convergence. Ainsi, l’Évangile propose une attitude vis-à-vis du "prochain" qui me semble exactement celle que devrait adopter tout homme lucide. Que Jésus soit ou non Fils de Dieu, j’adhère au programme qu’il propose. Peu importe que cette adhésion soit le fruit d’une foi.

Liberté :
Idéalement, j’aimerais que tout puisse être dit, y compris ce que je récuse complètement, par exemple les propos fascisants ou racistes ; mais j’aimerais que l’éducation de tous soit suffisante pour rendre ces discours inoffensifs. Nous sommes loin de cette situation. Il faut donc, provisoirement, avoir recours à la coercition pour lutter contre ceux qui luttent contre la liberté.


Khalil Gibran :

Travail (extrait de son livre "Le Prophète", le meilleur livre que j'ai lu) :
    Vous travaillez afin de marcher au rythme de la terre et de l'âme de la terre.
    Car être oisif est devenir étranger aux saisons, et s'écarter de la procession de la vie, qui marche avec majesté et en une fière soumission vers l'infini.
    Quand vous travaillez, vous êtes une flûte dont le cœur transforme en musique le chuchotement des heures.
    Qui parmi vous voudrait être un roseau muet et silencieux, alors que le monde entier chante à l'unisson ?
    On vous a toujours dit que le travail est une malédiction et que le labeur est une malchance.
    Mais je vous le dis, quand vous travaillez, vous accomplissez une part du rêve le plus ancien de la terre, qui vous fut assignée lorsque ce rêve naquit.
    Et en vous gardant proche du travail, vous êtes dans le véritable amour de la vie.
    Et aimer la vie par le labeur est devenir intime avec le plus profond secret de la vie.
    Mais si dans votre souffrance, vous considérez la naissance comme une affliction, et le poids de la chair comme une malédiction inscrite sur votre front, alors je réponds que rien d'autre que la sueur de votre front peut laver ce qui y est inscrit.
    On vous a dit aussi que la vie est obscurité, et dans votre lassitude vous répétez ce que disent les las.
    Et je vous dis que la vie est en effet obscure sauf là où il y a élan,
    Et tout élan est aveugle sauf là où il y a la connaissance.
    Et toute connaissance est vaine sauf là où il y a le travail,
    Et tout travail est futile sauf là où il y a l'amour ;
    Et quand vous travaillez avec amour vous attachez votre être à votre être, et vous aux autres, et vous à Dieu.
    Et que veut dire travailler avec amour ?
    C'est tisser une étoffe avec un fil tiré de votre cœur, comme si votre bien-aimé devait porter cette étoffe.
    C'est bâtir une maison avec affection, comme si votre bien-aimé devait résider dans cette maison.
    C'est semer le grain avec tendresse, et récolter la moisson dans la joie, comme si votre bien-aimé devait en manger le fruit.
    C'est insuffler dans toutes les choses que vous fabriquez l'essence de votre esprit.
    Et savoir que tous les morts vénérables se tiennent près de vous et regardent.
    Je vous ai souvent entendu dire, comme si vous parliez dans votre sommeil, "Celui qui travaille le marbre, et dévoile dans la pierre la forme de son âme, est plus noble que celui qui laboure la terre.
    Et celui qui s'empare de l'arc-en-ciel pour l'étendre sur une toile à l'image d'un homme, vaut plus que celui qui fabrique des sandales pour nos pieds."
    Mais je dis, non en mon sommeil, mais dans le plein éveil du milieu du jour, que le vent ne parle pas avec plus de tendresse au chêne géant qu'au moindre des brins de l'herbe ;
    Et que seul est grand celui qui, par son propre amour, métamorphose la voix du vent en un chant plus doux.
    Le travail est l'amour rendu visible.
    Et si vous ne pouvez travailler avec amour mais seulement avec dégoût, il vaut mieux quitter votre travail et vous asseoir à la porte du temple et recevoir l'aumône de ceux qui travaillent dans la joie.
    Car si vous faites le pain avec indifférence, vous faites un pain amer qui n'apaise qu'à moitié la faim de l'homme.
    Et si vous pressez le raisin de mauvaise grâce, votre rancune distille un poison dans le vin.
    Et si vous chantez comme les anges, mais n'aimez pas le chant, vous voilez aux oreilles de l'homme les voix du jour et les voix de la nuit.

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